Etude simple température atomiseur d’une e-cigarette – P1

10
8161
cigarette electronique electrode ouverte
Figure 1 : gauche : Découpe du corps de la cigarette électronique. Droite : détail d’un diffuseur ouvert. On peut voir la mèche qui amène par capillarité le e-liquide sur l’électrode de vaporisation.

La température atomiseur de la cigarette électronique représente-t-elle un danger ?

L’innocuité de la vapeur produite par une cigarette électronique reste un débat ouvert. De plus en plus d’informations existent sur la composition des e-liquides. Les fournisseurs multiplient les efforts de transparence et utilisent des ingrédients « safe » (ingrédients alimentaires, produits homologués FDA, etc.). Paradoxalement, l’effet de la température atomiseur sur la composition de la vapeur produite reste totalement opaque. Cette zone d’ombre alimente l’inquiétude croissante des utilisateurs de la cigarette électronique.

Parmi les risques liés aux diffuseurs, le plus important est la dégradation thermique du liquide au contact de l’électrode. Le fonctionnement d’une cigarette électronique repose sur un principe simple. Le e-liquide s’évapore au contact d’une électrode. Cette électrode est chauffée par effet Joule. Le e-liquide évaporé se condense ensuite pour former la vapeur visible et dense que l’on connaît bien.
Aucune donnée fiable n’existe aujourd’hui sur la température réelle de l’électrode qui produit la vapeur dans les diffuseurs. Pourtant, on sait qu’au-delà de 250 °C, le glycérol peut se décomposer et générer des composés toxiques comme l’acroléine. Tout vapoteur s’est un jour plaint de fumées au gout âcre ou d’odeurs de brûlé !

Si la température à l’intérieur du diffuseur dépend des modèles de cigarette électronique et de leur mode d’utilisation, il nous parait nécessaire de rationaliser cette information et d’en informer la communauté des vapoteurs.  La température atomiseur disponible sur le commerce est-elle compatible avec la production d’une vapeur saine ? Y a-t-il dégradation thermique de l’e-liquide au contact de l’électrode chauffante ?

Mesure de la température atomiseur de la cigarette électronique

cigarette électronique ego c joyetech eclatée
Eclaté de e cigarette ego c joyetech

Pour clarifier le débat, nous allons essayer d’apporter des éléments de réponse. Notre objectif est de mesurer la température des diffuseurs dans des conditions réelles d’utilisation. Nous avons choisi pour ce test d’utiliser le modèle de cigarette électronique le plus prisé actuellement : l’Ego-C de Joytech .

La mesure de la température atomiseur de cigarette électronique n’est pas simple. Le dispositif est à la fois intégré et miniaturisé. Cette conception réduit fortement l’espace disponible pour ajouter un élément de mesure. Ainsi, l’introduction d’une sonde de température devient presque impossible.
Par ailleurs, l’utilisation d’une sonde fausse la mesure. En effet, la sonde absorbe elle-même une partie de la chaleur. Cet effet ne peut pas être négligé lorsqu’il s’agit d’un élément aussi petit qu’une électrode de cigarette électronique. C’est pourquoi nous avons choisi une méthode de mesure sans contact : l’imagerie thermique. Cette technique présente un autre avantage, celui de fournir aussi une information spatiale sur la température.

Préparation et matériel de test

cigarette électronique électrode ouverteMesure de la température atomiseur de la cigarette électronique
Figure 1 : gauche : Découpe du corps de la cigarette électronique. Droite : détail d’un diffuseur ouvert. On peut voir la mèche qui amène par capillarité le e-liquide sur l’électrode de vaporisation.

Pour se rapprocher le plus possible des conditions réelles d’utilisation, nous avons choisi de mesurer la température de l’électrode du diffuseur in situ, sans extraire le diffuseur. Le modèle testé est une Ego-C 2 1000 muni d’un diffuseur standard 2,3 ohm et d’un réservoir de 2.5 ml chargé de liquide Tribeca (Halo) contenant 18 mg/ml de nicotine. Nous avons réalisé la mesure de température avec une caméra thermique de laboratoire PI450 (Optris), équipée d’un objectif germanium standard. Cet appareil permet de mesurer des températures par imagerie thermique dans une plage de 0 à 900 °C, avec une résolution de 0,04 °C.

Découpe du corps de la cigarette électronique.Mesure de la température atomiseur de la cigarette électronique
Découpe du corps de la cigarette électronique.

Observation de l’électrode chauffante

Pour observer directement l’électrode de chauffe contenue dans le diffuseur, nous avons découpé une fenêtre dans le corps de la cigarette électronique. Nous avons également ouvert le capot du diffuseur à l’aide d’un disque en céramique (figure 1). La cigarette électronique, équipée de sa batterie, a ensuite été placée verticalement sur un support, à environ 5 cm de distance. Elle est ensuite mise en marche manuellement.
Dès l’allumage, une épaisse vapeur se forme devant l’électrode et perturbe la mesure. Pour contourner ce problème, nous avons soufflé la vapeur à l’aide d’un ventilateur centrifuge (Sunnon Maglev), qui crée un flux d’air localisé dirigé vers l’électrode. La cigarette est de nouveau activée manuellement et une image thermographique est capturée une seconde après l’allumage.

Résultats thermographiques

Les premières images (figure 2) nous ont permis de mesurer une température moyenne sur l’électrode de 151°C après 1 s de chauffe, avec point le plus chaud à 176°C. Cette température de point le plus chaud est proche de la température d’évaporation du PG qui est de 188°C.

image thermographique d'un atomiseur ego c JoyetechMesure de la température atomiseur de la cigarette électronique
Figure 2 : image thermographique de la cigarette électronique ouverte avant sa mise en marche (gauche) et après 1 s de fonctionnement (droite). Les couleurs indiquent la température selon l’échelle indiquée sur l’image et la température indiquée correspond à la moyenne de la température mesurée dans le cadre blanc.

Dans ces conditions d’utilisation, la température de l’électrode reste limitée. Elle ne paraît pas suffisante pour décomposer les principaux composés des e-liquides, comme le VG, le PG ou la nicotine. Ces substances commencent en effet à se dégrader au-delà de 240 °C. Toutefois, la température mesurée reste étonnamment élevée. Elle suggère que ce seuil critique peut se franchir plus facilement qu’on ne l’imagine. Nous devons maintenant déterminer dans quelles conditions la température atomiseur devient dangereuse.

=> La suite de l’étude

10 Commentaires

  1. C’est intéressant tout ça. Est-ce que le ventilateur pourrait refroidir l’ensemble du dispositif de chauffe ? Quel est votre avis sur la température de décomposition de la glycérine végétale et ce fameux débat sur l’acroléine ? On entend souvent parler de ces 150 degrés nécessaires …

    • La présence du ventilateur ne semble pas modifier de manière importante la température (quand je le déplace, le rapproche ou l’éloigne, ça ne change pas grand-chose…).

      Concernant le débat sur l’acroléine, ça fait beaucoup de bruit, mais personnellement, je ne suis pas sure que ce soit le bon débat. A mon avis, l’opinion s’est emparée de l’acroléine parce qu’on en parle pour les huiles de fritures. Il y a production d’acroléine à partir de 250°C, mais surement pas de manière importante pendant les 2s que dure une bouffée de ecig.
      Ou sinon, je crois que l’on serait déjà tous mort dans les fast food ou les huiles atteignent ces températures… Par contre, quand les ecig surchauffent et que ça commence à sentir le roussi, là ce n’est pas pareil. Ça ressemble plus à de la combustion ou il n’y a surement pas que de l’acroléine qui est produite !

  2. C’est une étude très intéressante.
    Par contre est-ce que la force de l’aspiration (lors d’une utilisation réelle) a travers la cigarette ne permet pas de refroidir d’une façon plus ou moins importante la température de la résistance? (c’est le principe de certains vaporisateur US, je me pose donc la question 🙂
    Il me semble que la puissance du ventilateur est trop diffuse pour générer un refroidissement quelconque comme indique dans les résultats

    • Bonjour Gul,

      désolé pour le retard.
      Suite à de nombreuses interrogations concernant l’influence de l’aspiration sur la température, nous avons refait les tests en insistant particulièrement sur ce point. Le fait que nous ayons ouvert une « trappe » dans l’atomiseur participe aussi à une modification des températures en conditions d’utilisations réelles. Nous avons donc utilisé une sonde de température. La température d’ébullition de l’e liquide est atteinte (pallier d’évaporation) en 0,34 secondes de plus que sans aspiration et la température est plus basse de 2,3 °C. Nous referons ces test avec des conditions de tension plus basse afin de mettre en évidence cette influence de façon plus précise.

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.