La guerre contre la vape se durcit

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2023 semble se profiler comme étant une année charnière pour la vape. En effet, on constate, en ce début d’année, une crispation autour du sujet du vapotage un peu partout. On sent que la guerre contre la vape se durcit de par le monde et l’Union Européenne n’est pas en reste. La France non plus comme nous allons le voir.

Les taxes d’accise

Cela fait plusieurs années qu’il se murmure qu’un projet de taxation de la vape est dans les cartons. Jusqu’à présent, il s’agissait de rumeurs. Mais ce projet semble se concrétiser en ce début d’année 2023. Le journal Financial Times a pu avoir accès à des documents confidentiels mentionnant un projet de taxes d’accise sur les e-liquides nicotinés, et ce, dans le cadre de la prochaine directive européenne appelée TPD*. Aujourd’hui, nous sommes sous le régime de la TPD version 2 et la version 3 est donc en cours de préparation. Elle devrait voir le jour en fin d’année 2023 ou début 2024 au plus tard. Cette taxe d’accise prévoirait une augmentation du prix des e-liquides de 20%, pour les taux de nicotine les plus faible, et jusqu’à 40% pour les plus forts.

Et c’est une très mauvaise nouvelle, autant pour les vapoteurs actuels que pour (et surtout) les futurs candidats au sevrage tabagique. Rappelons que les produits de la vape sont dits « de consommation courante » et ne subissent donc qu’une simple TVA à 20%. C’est d’ailleurs aussi, en partie, pour cela que vapoter revient bien moins cher que fumer.

*Tobacco Product Directive

Les « Puffs »

La récente vague de dispositifs appelés « Puff » commence à affoler les autorités françaises. La « Puff » est une e-cigarette comme les autres. Jusque là tout va bien, sauf que celle-ci est jetable. Cela veut dire qu’une fois votre réserve de liquide vide, il faut jeter tout le dispositif. A n’en pas douter, c’est une aberration écologique dans tous les sens du terme. Les « Puff » contiennent du plastique, un peu de métal, de la mousse synthétique et surtout, un accu Litihum-Ion. Accu qui ne sera donc chargé qu’une seule fois alors que ceux-ci peuvent l’être entre 300 et 350 fois.

Les jeunes pris pour cibles

Mais au-delà de ça, ce qui pose un réel problème, c’est la cible marketing de la « Puff ». L’an passé, on a vu des influenceurs, jeunes et ciblant donc les jeunes, sur Tik-Tok ou Instagram, vantant le produit. D’autre part, ces « Puffs » sont aussi vendues dans des enseignes de grande distribution ou de discounters dont nous ne citerons pas le nom ici. Ce double problème a engendré une forte demande par les plus jeunes, souvent mineurs. Rappelons que la vape, que ce soit pour le matériel que les e-liquides (nicotinés ou non), est interdite de vente aux mineurs. Cependant, lorsque l’on passe à une caisse de supermarché, il est rare que l’on demande une pièce d’identité.

La publicité et la propagande sont également interdits. Ce qui se passe sur les réseaux sociaux est donc illégal. Mais on le sait, ces réseaux échappent à toute juridiction. De plus, les arômes proposés dans les « Puffs » sont particulièrement attractifs avec des goûts très fruités, sucrés et/ou frais. Bref, tout est fait pour attirer les plus jeunes (et donc les plus influençables).

La réaction des élus

Les représentant de la République ont pris le problème à bras le corps. Courant novembre 20221, le Sénat a voté une loi visant à taxer lourdement les « Puffs ». Le gouvernement s’est montré rétif à cette loi et a promis de revoir le sujet plus tard. A l’Assemblée Nationale, une députée, Francesca Pasquini, a initié un projet de loi, également en novembre dernier, avec l’optique d’interdire la puff sur le territoire2. Il est à noter que, pour les deux chambres, on distingue clairement la « Puff », ou e-cigarette jetable, de la vape traditionnelle.

Les conséquences

Tout cela nuit gravement à la filière vape sérieuse qui, elle, contrôle de très près l’âge de ses clients. De fait, elle se retrouve dans la tourmente, j’allais dire, une fois de plus. Personnellement, j’estime que les « Puff » sont une catastrophe du point de vue écologique. Donc, les voir disparaître ne me gêne pas plus que ça. Mais cela n’engage que moi. Les « Puff » peuvent avoir du sens si on la considère comme un moyen pas cher et facile pour s’initier à la vape et s’affranchir du tabac combustible. Mais cela doit reste très ponctuel. Le passage à la vape traditionnelle est préférable si l’on souhaite continuer dans la voie du sevrage. En attendant, on commence à voir se pointer des charges contre cette dernière à cause des « Puff ». Et ça … c’est bien plus grave.

Les arômes

Les arômes sont aussi sur la sellette. Ce sujet est aussi régulièrement évoqué car beaucoup d’arômes seraient trop « attrayants » pour les jeunes, avec, en point de mire, le fameux effet passerelle. Effet dont il a été plusieurs fois démontré qu’il est plus que marginal (voire même inversé)3,4,5. Mais quand on veut tuer son chien, on dit qu’il a la rage. Il est évident que ce sujet des arômes est connexe avec celui des « Puffs », cité plus haut.

Supprimer les arômes serait une catastrophe pour les vapoteurs qui se verraient limités dans leur choix entre tabac et menthe ; voire juste tabac. La diversité des arômes est essentielle à l’attrait que le fumeur peut avoir pour le vapotage en regard du tabagisme. Nous avons des exemples du non-sens d’une telle interdiction. On peut citer notamment la ville de San Franciso qui a voté un bannissement tous les arômes autres que menthe et tabac en 2018. Une enquête du JAMA6 a montré que la prévalence tabagique des adolescents avait augmenté par la suite, au lieu de diminuer comme escompté.

Taux de tabagisme pour les jeunes de moins de 18 ans à San Francisco comparé à d’autres districts californiens.

Offensive française

Début janvier 2023, la Direction Générale de la Santé a soumis au gouvernement un nouveau projet pour le PNLT (Programme National de Lutte contre le Tabac). Ce plan devrait être présenté en mars par le gouvernement. Dans celui-ci, la vape est directement visée et la DGS demande, entre autre, une suppression des arômes autres que tabac (même pas menthe). Afin d’appuyer ce projet, le CNCT (Comité National Contre le Tabagisme) a été envoyé au front pour s’occuper de la campagne médiatique. Évidemment, tous les médias ont repris ça en chœur, histoire de bien faire entrer cela dans l’esprit des citoyens et de mettre à mal, une fois de plus, le vapotage comment moyen de réduction des risques (et le plus efficace à l’heure actuelle7).

Au niveau de l’UE

Pour ce qui est de l’Union Européenne, la suppression des arômes semble être également à l’ordre du jour pour la future TPD V3. Comme vous le savez, la TPD est un règlement général que chaque état membre doit transposer, à minima, en droit national. Certains pays de l’UE ont déjà promulgué une telle interdiction. C’est le cas notamment de la Lituanie, l’Estonie, la Finlande, le Danemark et la Hongrie. Plus étonnant encore, une interdiction des arômes autres que tabac et menthe arrive le 1er juillet 2023 aux Pays-Bas. Le problème de toutes ces interdictions, c’est qu’elles pourraient faire jurisprudence et donner l’exemple à la Commission Européenne qui s’empresserait de l’inclure dans la TPD-V3.

Conclusion

Comme on le voit, l’année 2023 risque d’être décisive pour le meilleur moyen de s’affranchir du tabac. La désinformation, l’ignorance, la confusion, le manque de clairvoyance et parfois l’idéologie président aux décisions des autorités de santé en matière de vapotage. Pas seulement eu Europe d’ailleurs, mais dans le monde entier. Il n’y a guère qu’au Royaume-Uni et en Nouvelle Zélande que l’on reste pragmatique et que l’on s’appuie sur les preuves de la science.

Plusieurs associations et syndicats se sont déjà levés pour dénoncer ces attaques sans fondements. Citons la FIVAPE, le syndicat des professionnels de la vape, SoVape et AIDUCE. La Vape Du Cœur, association d’aide aux plus démunis pour quitter le tabac avec la vape, travaillant tous les jours avec le monde médical, ne comprends pas non plus une telle charge.

Quoiqu’il en soit, 2023 sera agitée. Ca va tanguer et il va falloir bien s’accrocher au bastingage. On pourrait se dire que l’on commence à être habitué étant donné que cela dure depuis 10 ans. Certes, mais cette fois, l’attaque est sévère et multipolaire.

  1. https://www.lesechos.fr/economie-france/social/le-senat-veut-taxer-les-puffs-les-cigarettes-electroniques-jetables-1878828
  2. https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/textes/l16b0464_proposition-loi#
  3. https://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1111/add.15330
  4. https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0761842519301317
  5. https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S076184251500296X
  6. https://jamanetwork.com/journals/jamapediatrics/fullarticle/2780248
  7. https://www.cochranelibrary.com/cdsr/doi/10.1002/14651858.CD010216.pub7/full/fr?highlightAbstract=cigarett%7Ccigarette%7Ce%7Ccigaret

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