Tous les ans, l’OMS publie un rapport sur l’état de son programme MPOWER, la pierre angulaire de la convention cadre appelée ,FCTC1 (ou CCLAT2 en français). Bien évidemment, la vape fait partie du lot de mesures préconisées aux états membres de la FCTC et un chapitre lui est consacré dans le rapport de l’OMS.
Voici le rapport traduit en français :
MPOWER & Co
Pour la mise en œuvre de la FCTC, l’OMS s’appuie sur un programme appelé MPOWER. Il s’agit en fait d’un acronyme résumant les mesures à adopter dans le cadre d’une lutte efficace contre le tabagisme :
Monitor tobacco use and prevention policies (Suivre les politiques de prévention et de lutte contre le tabagisme)
Protect people from tobacco smoke (Protéger les personnes contre la fumée de tabac)
Offer help to quit tobacco use (Proposer de l’aide pour arrêter de fumer)
Warn about the dangers of tobacco (Mettre en garde contre les dangers du tabac)
Enforce bans on tobacco advertising, promotion and sponsorship (Faire respecter l’interdiction de la publicité, de la promotion et du parrainage en faveur du tabac)
Raise taxes on tobacco (Augmenter les taxes sur le tabac)
MPOWER a été conçu pour catalyser l’action mondiale en faveur de la lutte antitabac. En protégeant plus de 5 milliards de personnes, je suis fier de dire qu’il a tenu sa promesse. Mais c’est une promesse qui doit être suivie. Nous devons continuer à donner la priorité à la lutte antitabac afin de protéger la santé de milliards de personnes supplémentaires à l’avenir.
Dr Magaret CHAN, ancienne directrice générale de l’OMS (2007-2017)
En gros, le programme MPOWER propose (impose ?) six mesures visant à faire diminuer ou stopper le tabagisme dans chaque pays adoptant ces mesures.
Le rapport annuel
L’OMS publie donc un rapport, tous les ans, sur l’avancée de l’adoption des mesures par tous les pays signataires de la FCTC/CCLAT. Autant vous le dire tout de suite, vous n’aurez aucun chiffre de résultats sur la baisse de la prévalence desdits pays. Non, ce rapport est un auto-plébiscite de l’OMS sur la satisfaction de voir les pays adopter les mesures MPOWER.
On peut lire, dans ce rapport, toute une litanie sur la façon dont les pays membres de la FCTC ont mise en place les mesures préconisées par l’OMS. Chaque ligne de MPOWER comporte un certain nombre de mesures que les pays membres adoptent à certains degrés. Les bons points sont attribués et les pays appliquant le plus haut niveau de chaque mesure se voit félicité par l’OMS. On parle de milliards de personnes protégées tout de même. Merci la foule…
Et donc ?
Et donc, point de résultats chiffrés dans le rapport, comme mentionné plus haut. En gros, si vous adoptez les mesures MPOWER au plus haut niveau, vous êtes bons dans tous les cas et obtenez les félicitations du jury. Et, bien entendu, lorsque les pays enregistrent une baisse significative de la prévalence tabagique, la vape n’y est jamais pour rien.
Alors, certes, je suis ironique, mais on ne va pas jeter le bébé avec l’eau du bain. La plupart des mesures sont cohérentes et pas forcément stupides. D’autres en revanche …
Augmentation des taxes
Je retiendrai particulièrement le R de MPOWER : augmenter les taxes afin de dissuader les fumeurs de consommer. C’est le genre de mesures qui hérissent le poil de tous les spécialistes sérieusement engagés dans la lutte contre le tabagisme. Jusqu’ici, on ne peut tristement constater qu’augmenter les taxes du tabac servent avant tout à renflouer les caisses des états déjà surendettés. Rappelons-nous qu’en France, le tabac rapporte près de 16 milliards d’euros de rentrées fiscales pour l’état. C’est une manne dont les ministères des finances ont du mal à se passer. Théoriquement, ces rentrées fiscales devraient diminuer, ce qui serait une bonne nouvelle. Que nenni. S’agissant de la France, la prévalence tabagique reste désespérément à un peu plus de 25% de la population (baromètre OFDT).
D’autre part, force est de constater que l’augmentation des prix ne fait pas baisser le tabagisme. Ah, si, officiellement, il y a moins de ventes dans les points de distribution (pas beaucoup). OK. Mais vous savez ce qu’il se passe quand ce genre de mesures entrent en vigueur, ou pire, quand il y a prohibition ? De la contrebande. Évidemment, les états omettent soigneusement de parler des ventes sous le manteau. On peut cependant noter l’augmentation drastique des saisies de contrebande chaque année. A titre d’exemple, les douanes françaises ont saisi 649 tonnes de tabac en 2022 contre 402 tonnes en 2021, soit +21%. Ca donne une idée de l’ampleur du problème.
Et la vape ?
2 milliards de personnes ne sont pas protégées par des restriction réglementaires sur les systèmes électroniques d’administration de nicotine
Rapport de l’OMS/FCTC 2023
Évidemment que le rapport de l’OMS parle de la vape. Oh, pas beaucoup, mais suffisamment pour être indigné de la façon dont l’organisme onusien considère le meilleur moyen d’arrêter de fumer dans le monde. Pour faire simple, l’OMS explique que : 2 milliards de personnes ne sont pas protégées par des restriction réglementaires sur les systèmes électroniques d’administration de nicotine (sic).
En fait, on est obligé de constater tristement que l’OMS place le vapotage au même niveau que le tabac fumé. Le rapport explique fièrement que 34 pays, couvrant 2,5 milliards de personne, interdisent le vapotage sur leur territoire. C’est consternant. On peut lire ensuite que 74 pays n’ont pas adopté d’interdiction ou de réglementation sur la vape, laissant ainsi plus de 2 milliards de personnes aux mains des industriels du tabac.
Encore une fois, la confusion entre fabricants de tabac et de vape est de mise. Chers amis fabricants de matériels et liquides indépendants, sachez que l’OMS vous considère comme le diable au même titre que Big Tobacco. Quand bien même la majorité de l’industrie de la vape est hors du circuit conventionnel du tabac.
Ensuite, le rapport de l’OMS s’étonne que peu de pays ont mis en place des mesures pour protéger les enfants des méfaits de la vape. Et là, on peut féliciter le marketing des puffs, depuis près de deux ans, d’avoir réussi à démolir 10 ans de travail acharné pour faire reconnaître la vape comme moyen de sevrage du tabac. Même si cette histoire d’épidémie de vapotage chez les mineurs est largement à nuancer et sachant que la vente est normalement interdite ; rappelons-le simplement.
Conclusion
Donc voilà, le rapport FCTC est publié et nous avons donc une bonne idée de ce qui se discutera en substance lors de la COP 10 de la FCTC en novembre prochain.
Les poncifs de l’appel à l’émotion sont bien là malgré la réalité des faits. Nous ne pouvons que constater une certaine hystérisation générale sur beaucoup de sujets, alimentée par les réseaux sociaux. Et le vapotage n’y échappe pas, quand bien même ceux qui crient le plus fort sont les moins informés du sujet. Il y a un terme pour qualifier ce comportement : l’ultracrépidarianisme. En gros et vulgairement : moins on en sait, plus on la ramène. Dès lors, les personnes peu ou mal informées ne peuvent qu’approuver le programme MPOWER de la FCTC. Et puis c’est l’OMS ma bonne dame. C’est forcément exact. Encore un biais bien connu appelé l’argument d’autorité.
Rappelons tout de même, si besoin en était, que la FCTC est financée en grande partie par des fonds privés. Michael Bloomberg y a déjà injecté 1,5 milliards de dollars. Et M. Bloomberg est un idéologue anti-tabac et surtout anti-vape patenté. Il influence donc considérablement l’OMS dans ses décisions. Mais il est tellement riche …….
Au final, ce rapport n’est pas totalement dénué d’intérêt. Il y a des mesures MPOWER qui ne sont pas forcément à jeter pour ce qui concerne la lutte anti-tabac. En revanche, pour la vape, le rapport de l’OMS devrait s’abstenir de porter un jugement aussi brutal. Les marchands de doute ont fait leur travail de sape depuis des années et, selon la taille du portefeuille, sont bien plus écoutés que les scientifiques. Pourtant, beaucoup de gens s’insurgent contre leurs décisions ; y compris d’anciens cadres de l’OMS.
- Framework Convention on Tobacco Control
- Convention Cadre de la Lutte Anti-Tabac