Le 4 juin dernier, le Journal of the American College of Cardiology (JACC) a publié un article alarmiste concernant l’effet des arômes de e-liquides sur le cœur. D’après cette étude, les utilisateur de e-cigarettes prennent un risque en vapotant des e-liquides aromatisés, en particulier pour la cannelle et le menthol.
Résumé de l’étude
L’étude a été réalisée par un collège de scientifiques de diverses universités américaines et soutenue par des organismes comme AHA (American Heart Institute, le NIH (National Institutes of Health) ou la FDA.
Contexte
Avec le succès grandissant de la cigarette électronique, il est impératif d’en évaluer les risques pour la santé, y compris les effets de leurs ingrédients, en particulier la nicotine et les arômes.
Objectif
Le but de cette étude était d’étudier les effets des liquides de cigarette électronique aromatisés, avec du sérum isolé d’utilisateurs de cigarette électronique, sur la santé endothéliale et des macrophages dépendants des cellules endothéliales.
Méthode
Des cellules endothéliales dérivées de cellules souches pluripotentes induites par l’homme (iPSC-EC) et une approche de criblage à haut débit ont été utilisés pour évaluer l’intégrité endothéliale. Le tout après exposition à 6 e-liquides différents avec des concentrations de nicotine différentes et au sérum de consommateurs de cigarettes électroniques.
Les liquides :
Six e-liquides différents ont été achetés en ligne dans des concentrations de nicotine de 0, 6 et 18 mg / ml et ont été conservés à 4 °C dans le noir. Les bouteilles ont été choisies pour représenter les 3 types de bases les plus courantes 50% PG / 50%VG, 80% PG / 20% VG et 100% VG) avec une gamme de saveurs populaires.
Population :
- 5 non-fumeurs en bonne santé
- 5 fumeurs actifs de cigarettes combustibles
- 2 vapofumeurs
- 2 utilisateurs exclusifs de e-cigarette
Les résultats
La cytotoxicité des liquides électroniques variait considérablement ; le produit à la cannelle étant le plus puissant et conduisant à:
Une viabilité cellulaire considérablement réduite.
Une augmentation des niveaux d’espèces réactives de l’oxygène (ROS).
Une activité de la caspase 3/7 et activation de l’absorption des lipoprotéines de basse densité par la voie liée au stress oxydatif et altération de la formation et de la migration des tubes, confirmant ainsi le dysfonctionnement endothélial.
Lors de l’exposition des cellules endothéliales à un e-liquide, le milieu conditionné induit une polarisation des macrophages dans un état pro-inflammatoire, ce qui induit la production d’interleukine-1b et -6, entraînant une augmentation de la ROS.
Après exposition des cellules iPSC-EC humaines au sérum des utilisateurs de cigarettes électroniques, une augmentation des ROS liées à un dysfonctionnement endothélial a été observée, comme en témoigne une altération des propriétés pro-angiogéniques.
On a également observé une augmentation de l’expression des cytokines inflammatoires dans le sérum des utilisateurs de cigarettes électroniques.
*Voilà enfin une bonne nouvelle longtemps contestée par bon nombre d’autorités sanitaires.
La réponse de K. Farsalinos
Beaucoup de vapoteurs confirmés connaissent le Pr Farsalinos, chercheur au Centre de Recherche Cardiologique Onassis à Athènes. Celui-ci étant impliqué de très près dans les recherches liées à la e-cigarette, une relecture sérieuse de cette étude a donc été faite.
Première remarque : les liquides utilisés lors de l’étude étaient sous la forme liquide originale et non vaporisés. Ce qui signifie que les effets observés dans l’étude n’étaient pas liés au processus de chauffe pouvant induire des produits de la dégradation thermique.
Deuxième remarque : il faut se pencher sur l’arôme incriminé appelé cinnamaldéhyde. En consultant la littérature à son sujet, on trouve des données intéressantes le concernant :
Propriétés anti-oxydantes, anti-inflammatoires, anti-cancéreuses, anti-diabétique et cardioprotectrices. On a, par exemple, constaté que le cinnamaldéhyde réduisait le taux de glucose plasmatique en améliorant la sensibilité à l’insuline et en augmentant l’absorption du glucose par les cellules. De même, on a observé une amélioration de l’homéostasie lipidique chez les rats diabétiques. Le cinnamaldéhyde aurait également des propriétés anti-microbiennes
Les effets cardioprotecteurs du cinnamaldéhyde comprennent :
- La prévention du remodelage cardiaque, de la fibrose et de l’hypertrophie.
- La réduction des lésions myocardiques ischémiques par la réduction du stress oxydatif et l’augmentation de l’activité anti-oxydante
- La réduction du dysfonctionnement endothélial induite par un taux de glucose élevé
- Des propriétés antithrombotiques et réduction de l’agrégation plaquettaire en favorisant la vasodilatation, dépendants de l’endothélium et indépendants.
Les propriétés anti-oxydantes et anti-inflammatoires du cinnamaldéhyde s’appliquent également à d’autres maladies, telles que la polyarthrite rhumatoïde. Le cinnamaldéhyde s’est également avéré avoir une activité anticancéreuse et neuroprotectrice (pour la maladie d’Alzheimer).
Conclusion du Pr Farsalinos
Le Pr Farsalinos ne veut pas dire que le cinnamaldéhyde est un médicament miracle, ni qu’il faut absolument en vaper. Cependant, les résultats de cette étude sont surprenants. Farsalinos rappelle que les liquides employés l’étaient sous forme liquide et que, par conséquent, le cinnamaldéhyde des e-liquide était identique à celui présent dans les aliments. La déduction simple serait de dire que le cinnamaldéhyde des aliments devrait être tout aussi toxique que celui des e-liquides pour les cellules endothéliales. On peut donc constater que des études cellulaires et animales montrent des résultats contradictoires avec celle publiée par le JACC. On peut aussi se dire que les effets observés étaient dus à d’autres composants des e-liquides.
K. Farsalinos conclut :
« Je ne pense pas que cette étude in vitro puisse véritablement représenter un modèle pour comprendre les effets cardiovasculaires des arômes de cigarette électronique «
Pour ma part, j’estime que d’autres études devraient être menées afin de corroborer ces résultats. Et comme toujours, les comparer avec la cigarette combustible.